Bonjour, bonjour!
Pas de posts pendant quelques jours, mes
excuses. Entre mes révisions pour un dernier examen passionnant sur le
droit de la concurrence communautaire et une angine impromptue, je n'ai
pas eu trop le temps de vous raconter mes dernières mésaventures. Mais
même si je n'ai pas fini mes révisions, je suis guérie. Après plusieurs
jours à ne pas sortir de chez moi, j'ai donc repris le dessus, fait le
ménage, et entrepris de faire une lessive. Quand on choisit un appart à
l'étranger, surtout à Londres, dans lequel on ne va passer qu'un an, on
doit faire des concessions. J'avoue que j'ai finalement été très
chanceuse parce que mine de rien (subtile référence au titre du blog,
vous remarquerez), je n'ai pas fait tellement de concessions. Pas de
lave-vaisselle, mais je me suis rapidement faite aux mains de
crocodile, mais un charmant studio, une terrasse, un parc tout mignon
sous mes fenêtres, bref gros coup de bol sur ce coup-là (un jour je
vous raconterai la recherche d'appart à Londres, ça vaut son pesant de
cacahouètes, mais ce n'est pas le sujet du jour). La seule grosse
concession qu'il a fallu faire, c'est sur le lave-linge. Et pas de
lave-linge, voyez-vous, ça veut dire laverie.
La laverie c'est un monde à part. Il y a toute une mythologie qui
entoure les laveries: My beautiful launderette, Ross et Rachel à leurs
débuts, ... Dans la vraie vie, une laverie c'est pas glamour. D'abord
on lave son linge sale en public, et tout le monde sait qu'il vaut
mieux faire ça en famille. La honte de sortir ses culottes et
chaussettes sales devant d'autres gens passe assez vite. Eux aussi
lavent leurs culottes et leurs chaussettes, alors il y a un accord
tacite dans les laveries, on ne regarde pas ce que les autres lavent.
Il y a aussi une autre règle tacite, quand on arrive perdu(e), et qu'on
se sait pas, où mettre la lessive, les pièces, combien pour le
sèche-linge, quelles machines marchent le mieux, quel sèche-linge est
le plus performant, on peut demander aux gens. Une fois qu'on sait, on
peut aider les autres (avec le petit air supérieur de "the one who
knows").
Une laverie c'est aussi un lieu où les gens discutent. Tout le
monde attend la fin de sa lessive alors beaucoup de gens en profitent
pour discuter. Je ne vous mentirai pas, il y a de tout. D'autres
étudiants, qui discutent de leur adaptation à Londres, des gros lourds,
forcément (spécial trophé perso, le gros lourd qui arrive à taxer le
numéro de téléphone parce qu'on l'a dans les mains à ce moment-là, et
qui appelle et textotte sans discontinuer pendant 6 mois alors qu'on ne
répond jamais et qu'on ne s'est pas recroisés). Grace à mon
super-trophé-winner, j'ai très vite décidé de ne plus aller à la
laverie le we. Détail inutile me direz-vous, mais non! Ce détail a son
importance parce qu'en semaine, les gens ne sont pas les mêmes. Eh oui,
les gens actifs, qui ont un boulot, des obligations en semaine, vont à
la laverie le we. En semaine, il y a (beaucoup) moins de monde, et on
croise, par exemple, beaucoup plus de personnes agées. C'est comme ça
que ce matin, j'ai fait la rencontre d'une gentille petite vieille
dame. Je vous dresse rapidement son portrait, la dame, plus de 70 ans
("I'm in my seventies you see"), était un peu perdue, et seule dans la
laverie, elle m'a demandé de l'aider. Je vous l'ai dit, il y a une
solidarité tacite dans les laveries, alors je lui ai expliqué comment
tout marchait. Et là, la conversation était lancée. La dame en
question, je vous en parle parce qu'elle a éclairé ma matinée!
Toute petite, irlandaise, tout droit sortie du siècle dernier, la dame
m'a pêle-mêle parlé des pommes de terre, de la méchante Europe qui
envoie des hélicoptères au-dessus des terres des irlandais pour leur
faire abattre leurs vaches (gros effort de bibi pour ne pas entamer un
débat sur l'Europe, sujet qui me tient particulèrement à coeur), de ma
bonne éducation qui me pousse à trier les couleurs avant de faire mes
lessives, et en bonne grand-mère qui se respecte, de comment c'était
beaucoup mieux avant, quand les femmes faisaient des efforts pour leur
mari et savaient tenir une maison. Dans le cadre de ce dernier sujet,
alors que j'étais en train de plier mes affaires toutes chaudes et
sèches à peine sorties du sèche-linge, la dame m'a même, et là je vous
le dis, j'étais scotchée, chanté une chanson pour me démontrer comme
avant on faisait des chansons qui remontaient le moral, avec des
paroles saines, alors que maintenant les paroles ne portent plus que
"couche avec ton voisin et secoue tes fesses" ("sleep around et shake
your bottom" en VO). Pour que vous ayez une bonne vision de la scène,
mon moi et mon surmoi n'avons pas pu résister:
Pour finir, après ce tour de chant aussi surprenant que ma foi amusant
(passé la surprise), la bonne dame m'a expliqué qu'elle devait partir à
la messe. Dans sa bonté, elle m'a demandé si j'avais moi-même un prêtre
à qui parler, et comme la réponse fut négative (un jour je vous
raconterai peut être aussi pourquoi l'Eglise et moi on est plus très
proches), j'ai eu droit, en bonus, à un petit laïus sur la nécessité de
la religion dans la vie, et sur un magique (et mémorable) "I'm surprised your mother
has not found you another priest poor thing!" (maman, je te remercie au contraire
de ne m'avoir poussée à rien ;) ). La petite dame s'en est ensuite
allée, en me lançant 2 ou 3 "see you darling, take care", et je suis moi-même rentrée chez moi, à vrai dire souriante,
plutôt contente d'avoir rencontré cette petite dame plutôt qu'un gros
relou, mais aussi de vivre à une autre époque que la sienne.